ALLELUIA ALLELUIA ALLELUIA

"Je suis le pain de vie"

mercredi 7 juin 2017

Pentecôte

Derrière le récit de la Pentecôte, tel que nous le décrit le Livre les Actes, et que nous avons comme première lecture de la Messe d’aujourd’hui, se profile en filigrane l’histoire de la tour de Babel et l’origine de la multiplicité des langues.

Cependant, pour bien percevoir le lien entre les deux récits, il ne faut pas faire du récit de Babel une lecture de type colonial, où l’unicité de la langue apparaîtrait comme un idéal et la multiplication des langues comme un châtiment divin. En réalité le sens du récit (au chapitre 11 du livre de la Genèse) est tout différent. Il s’agissait d’une critique de la prétention de Babylone à la domination universelle. La multiplication des langues mit fin à cette prétention. Par cette affirmation de leur différence les hommes se sont libérés de cette hégémonie. La construction de la tour qui prétendait s’élever jusqu’au ciel fut arrêtée et chaque peuple découvrit et affirma son identité propre.

Ce qui se produit le jour de la Pentecôte, ce n’est pas un miracle transformant les Apôtres (et tous les disciples présents, qui sont au nombre de 120, il ne faut pas l’oublier – cf. Actes 1,15) en autant de polyglottes parlant toutes les langues. Le miracle se produit plutôt chez les auditeurs. (C’est d’ailleurs la même chose que dans tous les récits d’apparitions – anciennes ou récentes. Ce qui se produit se produit toujours dans le voyant et non pas à l’extérieur de lui). Dans notre récit de la Pentecôte, chacun entend le message dans sa propre langue. Et Luc prend plaisir à établir une longue liste des peuples d’où proviennent tous ceux qui reçoivent le message : ce sont des Parthes, des Mèdes, des Élamites, etc. etc. (C’est ainsi que sont nées dès les premières années après le Christ les Églises de la diaspora, comme celle d’Égypte, qui sera une terre si fertile pour le monachisme quelques siècles plus tard)

Je ne puis m’empêcher ici de penser à cet admirable passage du « Testament » de Christian de Chergé quand, il parle de sa « lancinante curiosité » de voir ses frères de l’Islam à travers les yeux de Dieu, tout illuminés de la gloire du Christ, [et] ... investis par le Don de l'Esprit dont la joie secrète sera toujours d'établir la communion et de rétablir la ressemblance, en jouant avec les différences.

Dieu nous a tous faits différents les uns des autres. Cette différence, qui est l’une des caractéristiques de notre beauté comme créatures, est très importante aux yeux de Dieu, qui la respecte et y prend plaisir. Si nous nous regardons mutuellement avec les yeux de Dieu, nous admirerons et respecterons cette différence. Cela vaut des personnes. Cela vaut aussi des peuples et des nations.

Ce message vaut aussi pour tous les temps. Il assume une signification et une importance toute nouvelle en notre temps. A Babel, tous parlaient la même langue et étaient réunis dans un même projet -- un projet qui portait en lui-même la source de leurs discordes et de leurs divisions. La Pentecôte est au contraire le symbole d'un idéal de rencontre de toutes les cultures – y compris leurs approches religieuses particulières -- dans le respect mutuel des différences dont la grande diversité constitue la richesse même du monde créé qui représente ainsi les diverses facettes de la beauté de Dieu.

L’Église d’aujourd’hui est confrontée au même défi. Dans les années qui ont suivi la Réforme protestante et la Contre-Réforme, jusqu’à Vatican II, diverses causes ont provoqué un mouvement d’uniformisation gommant les différences. Vatican II a réaffirmé l’importance d’annoncer le message de telle sorte que chaque peuple et chaque culture le reçoive dans sa langue, c’est-à-dire dans le respect de tout ce qui fait sa différence culturelle. Après Vatican II on a beaucoup parlé de l’option préférentielle pour les pauvres ; de nos jours il faut peut-être se soucier de l’option préférentielle pour la différence. L’Église née le jour de la Pentecôte se doit d’être une présence humble et respectueuse au sein de chaque peuple et de chaque groupement humain, et non la branche religieuse de quelque forme que ce soit d’hégémonie.

Pour cela chacun de nous doit s’ouvrir à l’Esprit Saint qui veut faire en nous sa demeure. C’est le thème de l’Évangile d’aujourd’hui.


Fr Marie-Robert (osco)

samedi 3 juin 2017

SESSION COREB – JEUNES AU MONASTERE SAINT REMACLE A WAVREUMONT -
12 ET 13 MAI 2017
Thème de la session :
LE RESPECT A LA CROISEE DE LA CONFIANCE ET DE LA RENCONTRE
Par frère Renaud THON, Prieur
Etymologiquement, « RESPECT » vient de « Retrospicere », qui signifie « se retourner pour regarder, prendre du recul. C’est voir la personne comme un lieu de dignité ; dignité donnée par Dieu. On peut dire aussi que le « RE » de « respect » marque le recommencement, la répétition du commencement. C’est-à-dire, toujours repartir à la découverte de l'autre. Ne pas l’enfermer dans ce que l’on croit connaître de lui.
Le respect a toujours à voir avec la relation. Le Judaïsme et le Christianisme sont des religions de relation. Dans l’A.T., les différents noms de Dieu expriment les différents degrés de la relation de l’homme à Dieu. «ELOHIM» (pluriel) : exprime une relation à Dieu pour ce qu’il donne, pour ce que l’homme attend de lui : la pluie, la fécondité, la victoire etc. « EL » : exprime une relation à un Dieu qui fédère. On se reconnaît dans le culte que l’on rend au vrai Dieu Unique. Le « Tétragramme » YHWH désigne le Dieu de la rencontre intime et personnelle avec l’homme. Dieu se révèle dans l’ouverture à l’autre, dans l’altérité, dans la relation. Dieu parle à l’homme. Celui-ci écoute !
« Ecouter », c’est plus qu’écouter, même attentivement. C’est ouvrir son cœur. C’est Obéir !
Le respect envers Dieu, c’est respecter, pratiquer ses commandements dans l’écoute et la patience. Ils sont paroles de vie. Ils sont promesse…
Le «Shema, Israël, tu aimeras le Seigneur ton Dieu» du Deutéronome (6,4) est promesse.
Le «Ecoute, tu parviendras» de la Règle de saint Benoît (P, 1 et 73) est promesse.
Ecouter : pour entrer dans le respect dans la liberté de celui qui choisit cette attitude, il faut commencer par cela ! L’écoute mène à la connaissance, qui mène à l’amour.
Notre Dieu est un Dieu qui appelle. Par la vocation, Il nous a distingués, nous a extraits de la masse, nous a posés dans une communauté pour y vivre la fraternité. La fraternité est un don, jamais acquis. Il faut le travailler tous les jours. La fraternité commence par des « frottements », qui peuvent générer deux craintes. La première crainte est la peur de l’autre, que l’on voit comme un concurrent, un rival. La deuxième crainte est la peur de perdre l’amour de l’autre. A cet égard, JESUS, « doux et humble de cœur » est notre modèle. Comme Lui, ne pas juger, ne pas vouloir dominer !
La Bible nous apprend à ne pas nous mettre dans la soumission. Il faut sortir de l’affliction du destin pour entrer dans la construction de la destinée ! Ainsi, Abram se met en marche dans la confiance et devient « Abraham ». Ainsi Saraï, ‘Ma’ Princesse (qui appartient à) devient « Sarah », une personne dans son entière liberté.
Le respect implique à la fois le retrait, la distance juste, pour laisser à l’autre son territoire de liberté, et l’avance vers l’autre, pour aller à sa découverte. Dans cet esprit, le cloître monastique se révèle le « vide » de respiration nécessaire, autour duquel s’articulent tous les lieux de rencontre de la Communauté.
Le contre-respect, c’est la dévalorisation publique de l’autre. Ce qui s’oppose au respect, c’est la convoitise, qui, dans la Bible, est la satisfaction immédiate de ses désirs, si douloureusement illustrée en 2 s 13. L’homme doit apprendre à maîtriser ses pensées, qui sont les racines de ses actions ! Respecter l’autre, c’est se respecter soi-même, se contrôler, pour ne pas blesser.
Se sentir respecté est primordial. Le plus faible, le malade doit recevoir un respect tout particulier, car c’est le Christ souffrant que l’on recherche en lui.
Le respect concerne aussi la propriété. Le penchant à posséder pour soi (pour un usage pas immédiat) est contraire au respect envers la communauté et doit être réprimé (Jos. 7). L’individualisme, en effet, conduit à l’égoïsme et l’égoïsme amène à se mettre à l’écart de la communauté. Si une certaine solitude est nécessaire, elle ne doit pas conduire à l’isolement.
L’unité est vécue dans le nombre 13 : 12 + 1, c’est-à-dire la communauté plus UN, DIEU.
Dès lors, il va de la responsabilité de chacun des membres de la communauté de veiller à en garder l’unité et ce par la relation profonde qu’il a avec le Seigneur. Car, c’est dans l’unité que Dieu est présent et agit. La défection de l’un des membres brise l’unité avec Dieu. Il faut donc veiller les uns sur les autres pour que l’un de ses membres ne sombre pas dans ce qui peut nuire à la communauté. Mais si cela arrive, c’est alors la souffrance de la communauté qui la rend unie, dans la prière, devant Dieu (RB 28,5).
Et s’il survient un imprévu, le laisser s’installer. Choisir une solution adaptée à la situation. Lire les événements comme une Lectio Divina : Dieu nous parle !
Il faut accepter la vie telle qu’elle est.
Veiller et écouter JESUS qui apprend à ses disciples à « Garder la foi dans les tribulations » !


En conclusion : oui, vraiment, le mot « Respect » est à épeler dans un esprit d’amour envers Dieu et son prochain.
Le respect est le tout premier pas, dans l’humilité et la patience, pour entrer dans l’altérité.
Alors, transformons nos fragilités en amour.
Et pourquoi ne pas user de ces petits mots qui transfigurent une journée : « TU AS DU PRIX A MES YEUX »
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Wavreumont Mai 2017 fut encore une belle session, riche de l’enseignement chaleureusement prodigué par Frère Renaud THON et vécue dans une joyeuse fraternité dans cette Maison accueillante au cœur d’un magnifique paysage !
Sans oublier la mémorable soirée « festive » avec la découverte de nouveaux et fraternels visages.
Et dans la découverte de nos multiples diversités par l’ « exportation » d’objets typiques des différents pays et…continents !
MERCI A TOUS



Sr Marie Fabienne, Abbaye de Brialmont